Nowhere : vivre une utopie pour se (re)trouver
Je reviens d’un endroit magique, une bulle de liberté, un espace utopique dans le désert espagnol des Monegros : Nowhere.
A Nowhere, j’ai repoussé mes limites, accepté l'inconfort, explosé de rire devant l’incongru. J'ai bousculé mes habitudes et me suis prêtée au jeu de l’inconnu. Je me suis émerveillée devant la beauté du ciel et des corps célébrant la vie. J'ai découvert de nouvelles parts de moi, et redécouvert la liberté.
Des échanges humains plutôt que des échanges commerciaux
Nowhere est le petit frère de Burning Man, cet évènement mythique qui rassemble chaque année 50 000 personnes dans le désert du Nevada pour créer, échanger, célébrer ensemble. Avec 20 fois moins de participants, Nowhere a des airs de village.
Car Nowhere n’est pas un festival. C’est littéralement une utopie (no-where = nulle part = sans lieu = u-topos), un espace où l'argent n'a pas cours, et où les participants s'auto-organisent grâce à des principes forts de coopération et d'entraide. Pendant 6 jours, 30 camps thématiques auto-gérés sortent de terre, des dizaines d’installations artistiques et participatives sont exposées sur la « playa » (le vaste terrain central de l’événement), des centaines d’ateliers sont proposés par les participants sur le principe du don. Une expérience coopérative renversante !
Tout est possible, dans la seule limite de votre créativité, des moyens à votre disposition et du respect d’autrui et de la nature. Dans cet espace, il n’y a plus de règles sauf 10 règles : les 10 principes fondamentaux des « burns ».
La liberté radicale d'être soi, avec les autres
La plus importante d’entre elles est la « self expression » : l’expression radicale de soi. Tout est bienvenu par défaut. Tout est "expérimentable", que ce soit sur le plan social, relationnel, vestimentaire ou créatif. Si vous avez envie de proposer quelque chose, proposez-le. Si vous avez besoin de quelque chose, cherchez-le. Si vous ne savez pas ce que vous cherchez, marchez et vous trouverez. Car la « playa » vous apportera toujours ce qu’il vous faut : un granité glacé, une paire d’oreilles, un endroit où aimer votre prochain ou tout simplement une bonne dose de n’importe quoi.
Et "pourquoi pas" ?
De ce sentiment de liberté et d’accueil inconditionnel naît une joie profonde qui ne prévient pas, tantôt naïve et enfantine, tantôt sereine et apaisée. Dès qu’un « pourquoi ? » surgit, une seule réponse s’impose : « pourquoi pas ? », une question qui s’érige en maître mot, cassant les codes du raisonnement cartésien, explorant les confins de l’humour et du possible.
Nowhere est une expérience éphémère dans laquelle tout se vit dans le moment présent (now-here = ici et maintenant). Il n’y a rien à attendre de demain ni d’ailleurs. Le FOMO ("Fear of Missing Out"), c'est-à-dire la peur de louper un évènement, disparaît. La curiosité, l’envie et la joie deviennent boussole, aiguillée par le rythme des musiques et des rencontres nouées au détour d’une danse, d’une conversation ou d’un "shift" cuisine.
Des dizaines d’ateliers et d’expériences sont proposés par jour. Et comme il est impossible d’en décrire la diversité sans l’affadir, j'ai préféré vous en partager un court échantillon :
- Chercher les frissons d’un massage aux glaçons
- Se transformer en chaise pendant une heure
- Concourir dans une bataille d’oreillers, de peinture ou de blagues vaseuses
- Se relaxer dans une boîte à la lumière tamisée, couverte de miroirs, au son de la lecture chuchotée d’un livre de cuisine en mode ASMR
- Apprendre les secrets du bondage japonais
- Dessiner un nu au fusain les cheveux dans le vent
- Découvrir la médecine des plantes
- S'enduire tout le corps de peinture fluo
- S’initier à l’art du toucher tantrique au lever du soleil
- Danser sur de la new wave ou du down tempo au coucher du soleil
- Ecrire un poème à 12 mains
- Découvrir la capoeira
- Se jeter dans un bain de boue après la pluie
S'apercevoir que nous vivons dans un château
Nowhere s’amuse à décaler le regard, à fait sortir de sa zone de confort et d’habitude. Nowhere fait grandir par la découverte de la liberté qu'on s'autorise à se donner et à accepter chez soi et chez les autres. "Nous pensions habiter une chambre sous les combles et nous nous apercevons que nous habitons un château." (Thomas d'Ansembourg)
Une amie m'a dit, en rentrant chez elle :
"C’est drôle, je n’avais pas l’impression d’être changée et pourtant, quand je regarde les photos, je vois le décalage, je vois des réactions différentes, je vois de la liberté”.
Les burns (la grande famille des évènements issus de Burning Man) sont clairement une source d’inspiration pour nous, co-fondateurs de La Clameur, qui cherchons à offrir des espaces de liberté, de douceur, de créativité et de partage.
Aurore, pour La Clameur